Si un écrivain racontait l’histoire des CFL, il décrirait peut-être un monde cartésien rempli de techniciens, de mécaniciens et d’ingénieurs à l’esprit mathématique. Ce serait alors une histoire bien incomplète. Car, dans le grand récit des CFL, il faudrait aussi des personnages à l’âme d’artiste. Comme Andy, ce superviseur du trafic qui est aussi un auteur jeunesse aimant poser sur le monde un regard d’enfant… et y voir des perspectives et des solutions inusitées.

Sur les rayons du libraire, son livre racontant l’histoire d’une étonnante petite fille au corps fait de cordages est placé bien en vue. Dans le paysage littéraire du Luxembourg, Andy est l’un des rares auteurs à écrire pour la jeunesse en luxembourgeois.

« Forcément, les Luxembourgeois lisent beaucoup d’œuvres traduites et les écrivains locaux sont moins nombreux, explique-t-il. Nous sommes pourtant un petit pays multiculturel qui regorge d’histoires, et je pense que le luxembourgeois, cette petite langue secrète et méconnue, doit rayonner dans les livres parce qu’elle est notre meilleur point commun et notre espace de dialogue et de solidarité. »

Lui-même père de trois filles, dont il s’inspire volontiers pour inventer ses histoires, Andy mène aussi discrètement une carrière brillante aux CFL. Dans les émissions culturelles où l’on célèbre son écriture, les animateurs ne posent jamais de questions là-dessus. Pourtant, Andy considère que son travail dans le monde ferroviaire est tout aussi créatif que ses séances d’écriture.

« Quand j’écris, je tente de reproduire l’état d’esprit de l’enfant, ce qui me permet de penser autrement, avec une rationalité différente, parfois en recourant davantage aux images. »

« Ça me sert aussi quand je dois trouver la solution à un problème de circulation des trains : il faut cultiver une ouverture à des solutions diverses, regarder les situations sous plusieurs angles, penser hors du cadre, trouver une façon de faire qui dépasse ce qui est attendu, voir plus loin que l’horizon habituel. »

Il était une fois…

Andy a grandi dans le nord du Luxembourg, dans un petit village. Prairie, forêt, verdure : son enfance a été marquée par un accès immédiat à la nature. Très actif au grand air, il retrouvait son calme dès que retentissait la sonnerie de l’école. Andy aimait beaucoup son instituteur.

« J’ai eu le même instituteur pendant toute l’école primaire, se souvient-il. C’était une situation hors-norme. Et c’était vraiment un homme respectable ; il était gentil ; il était calme ; il avait beaucoup de clairvoyance. J’avais l’impression qu’il savait presque tout. Il m’impressionnait. Je voulais lui ressembler. »

Après une adolescence turbulente pendant laquelle il découvre déjà le pouvoir des mots et de la poésie – « ça me calmait », dit-il – Andy décide de suivre les traces de son ancien instituteur et de devenir enseignant. Rien ne le prédestine alors à une carrière de cheminot. Il veut être prof, un point c’est tout.

« J’ai toujours été fasciné par les mécanismes de la transmission, explique-t-il. Je trouve cela beau de pouvoir identifier les intérêts de l’enfant en bas âge, et de lui donner le support dont il a besoin pour développer ses passions. »

« On ne sait jamais quel enfant sera le prochain à trouver un remède contre le cancer, s’il est bien soutenu dans ses apprentissages et motivé dès le plus jeune âge. »

Mais, après quelques années d’études en Belgique et un stage à Bruxelles, Andy s’aperçoit que le métier d’instituteur tel qu’on le pratique aujourd’hui entre en choc avec son idéal. Il ne sera pas enseignant. « Il manque dans les pratiques actuelles une dimension classique de transmission du savoir, pense-t-il. On valorise beaucoup l’apprentissage par projets – et croyez-moi je trouve ça très bien – mais, je crois aussi que, parfois, il faut savoir enseigner simplement que 1+1=2. Il y a des savoirs qui ne s’acquièrent que par un cours magistral plus traditionnel. »

Un revirement inattendu

À l’horizon, les CFL apparaissent soudain à Andy comme un lieu de travail idéal. « C’est une entreprise qui exerce une fascination, dit-il. C’est si romantique, l’univers du train, le dépaysement du voyage, la technologie brillante qui fait que tout cela fonctionne. »

Il devient chef de circulation, un emploi lui permettant de valoriser un profil scientifique entretenu depuis sa prime jeunesse. Andy était certes un ado épris d’écriture et de poésie, mais également tout à fait doué en mathématiques et en biologie. Dans le grand roman de sa vie, l’art côtoie toujours de près la science et la technologie.

Il y a d’ailleurs un petit quelque chose de cinématographique dans le quotidien professionnel d’Andy, pourtant très technique. Dans un film sur sa vie, la caméra entrerait dans son bureau en faisant de grands plans aériens montrant la disposition arrondie, voluptueuse, des postes de travail où s’affaire une équipe de cinq personnes. On les verrait sur le qui-vive, scrutant attentivement les huit écrans affichant des cartes interactives du réseau CFL et les mouvements des trains en temps réel.

« On utilise un outil informatique, ARAMIS, qui montre l’emplacement de tous les trains. Les aiguilles, les signaux et les blocs de section sont également affichés sur des tableaux graphiques. On peut voir en temps réel s’il y a un risque que deux trains se croisent, ou repérer les incidents, les imprévus, les obstacles pouvant causer des retards. »

Tension et adrénaline

Si le moindre problème survient, Andy et son équipe doivent anticiper les répercussions sur l’ensemble du réseau et trouver des solutions pour acheminer quand même les voyageurs rapidement du point A au point B. Dans ces moment-là, l’adrénaline est à son comble. Parfois, c’est un passage à niveau en dérangement, parfois un train qui a des problèmes techniques, ou encore un évènement plus sérieux, nécessitant l’intervention des pompiers.

« Il peut aussi s’agir d’un arbre tombé sur les caténaires, d’incendies près des rails, d’enfants jouant sur les rails qu’il faut évacuer, énumère Andy. C’est très varié, et on ne sait jamais à quoi on devra faire face. »

« Le travail d’équipe est crucial, il faut avoir une bonne mécanique bien huilée en équipe et une communication efficace. Ça demande à la fois une connaissance et une compréhension générale du réseau et des horaires et trajets, ainsi qu’une connaissance des règles de sécurité. »

Et le poète revint

Son travail le comble. Et lorsqu’Andy est devenu papa, il a renoué avec l’écriture… et avec le plaisir de la poésie simple du quotidien. Les libraires vendent aujourd’hui son deuxième livre, l’histoire d’une fillette qui rêve d’aller vivre sur la Lune pour échapper à une vie trop rigide sur Terre. Mais la Lune ne l’entend pas ainsi.

« Pour moi, il est très facile de garder un cœur d’enfant, dit-il. Dans le monde des enfants, tout est toujours plus simple; on trouve toujours une solution à tout. Ils sont dans le moment présent, dans l’émerveillement. Je trouve les adultes tellement plus compliqués, moins spontanés. Je suis encore un grand enfant. »

Andy est la preuve vivante qu’il est possible de conjuguer une carrière brillante aux CFL et un parcours artistique vibrant, tout en gardant son âme d’enfant. Si vous aussi êtes un artiste qui se rêve également cheminot, rejoignez les CFL et faites fleurir vos deux passions.

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